De l'art et de la maniere de court-circuiter les agences...

[Nekhro]

Ça a chauffé dites-moi

Aussi l'analogie avec les délocalisations est très mauvaise, je m'excuse. Une délocalisation consiste à confier le même outil de production à des salariés moins bien payés. Ce n'est pas cela dont on parle ici.
(…)
Est-ce que vous allez toujours sur la Côte d'Azur par la male-poste afin de soutenir les relais de diligence ? Non. Pourtant il n'a jamais été question de délocalisation à leur sujet, ni de continuer indéfiniment à les rémunérer à leur juste travail. C'est simplement qu'un jour les choses ont fait qu'on a plus eu besoin d'eux.

J’avais fait cette analogie sur ce même fil (ou un autre, je ne sais plus) et je suis donc d’accord avec Corinne 'tite route. Ou tu préfères qu’on parle de sous-traitance si tu veux. Mais le résultat est le même. On aura un produit fait pour moins cher. Sauf que pour Métro (ou tout autre structure du genre), la sous-traitance est encore moins cher, gratuit ou presque, mais est dans notre propre pays. Ils jouent sur deux ressorts pour faire passer ça : l’appartenance à une communauté (web 2.0 and co.) et la reconnaissance lors de la publication, ce que défend thierryler.

Pour ton exemple sur les relais de diligence, il n’est pas bon non plus. On parle de photo, avec, a fortiori, un photographe derrière. Il est normal de payer cette personne. Qu’il soit pro ou amateur, la manière de faire n’a pas beaucoup changé. On en aura toujours besoin. Ou alors tu a inventé un système qui fait les photos toutes seules (comme Sony avec son socle tournant qui prend tout seul les personnes tu me diras ).

[vince]

Non, et non, encore pas d'accord avec la sous-traitance, qui est d'ailleurs assimilable à de la délocalisation : c'est faire faire le même travail mais dans des conditions sociales désavantageuses. C'est très mal, ça pose des tas de problèmes sociaux outre les problèmes d'efficacité à long-terme.

Encore une fois ça n'est pas ça, c'est juste que le mode de production des images a subi une révolution gigantesque et que le métier de photographe à papa (pardon Ear) ne rentre plus bien dans le nouveau modèle.
Le fait est que, lorsqu'Internet nous offre des milliers, voire des millions d'exemplaire de photos du pont du Gard ou de Notre Dame de la Garde, dont certaines sont parfaitement chouettes, on se dit qu'il n'est plus absolument nécessaire de mandater un photographe pour aller refaire ce même cliché et pour le plaisir de pouvoir le payer.
C'est un besoin qui disparait. Comme ont disparu le besoin de faire aiguiser ses couteaux et le besoin d'entretenir des chevaux de poste tous les 30 lieues. Je ne dis pas que c'est bien ou mal. Mais c'est la réalité.

Le besoin de nettoyer les bureaux en revanche lui, n'a pas disparu, mais il est sous-traité à des travailleurs précarisés. Ca n'a rien à voir.

[Nekhro]

Le fait est que, lorsqu'Internet nous offre des milliers, voire des millions d'exemplaire de photos du pont du Gard ou de Notre Dame de la Garde, dont certaines sont parfaitement chouettes, on se dit qu'il n'est plus absolument nécessaire de mandater un photographe pour aller refaire ce même cliché et pour le plaisir de pouvoir le payer.

Le problème n’est pas de refaire ou de trouver une photo. De toute façon, en France, pour exploiter une photo, il faut établir une cession de droits et payer des droits d’exploitation. Et à quel moment on en parle de ces droits ? Dans beaucoup de cas, ils sont tout simplement ignorés. Les conditions de rémunération de Métro, par exemple, sont tout simplement ridicules. Donc même si les photos sont disponibles en masses, ça ne dédouanent pas les entreprises de se conformer aux lois. Au moins en ce qui concerne la France puisque nous y sommes.

[Corinne 'tite route]

Non, et non, encore pas d'accord avec la sous-traitance, qui est d'ailleurs assimilable à de la délocalisation : c'est faire faire le même travail mais dans des conditions sociales désavantageuses.

Ne pas payer une photo ou alors au lance-pierre et en dehors de tout cadre professionnel, c'est bon pour les conditions sociales ? Faut m'expliquer...

Le besoin de photos n'a pas changé, il est même largement plus fort qu'avant. Après, que les commanditaires de photo se contentent de photos approximatives ou cherchent le plus bas prix, ce n'est pas un besoin qui a changé, c'est la façon de faire. Et c'est ça qui est déplorable.

[vince]

Ben oui, comme quand on a commencé à prendre le train pour voyager au lieu d'utiliser nos bonnes vieilles diligences, mettant toute une filière sur la paille. Le besoin "déplacement" existait toujours mais le modèle économique a subi une mutation irreversible.

Je ne considère pas que la société dans son ensemble subisse un préjudice. Entendons-nous bien : quand une boite vire ses employés pour les remplacer par des intérimaires qui font le même boulot moins bien payé c'est un modèle social qui se dégrade, mais quand une profession disparait parce que le modèle économique n'est plus adapté, c'est sans doute triste mais les effets sont localisés.

[ear_78]

Ton exemple avec les délocalisations n'est pas terrible... Car tu devrais ajouter que la qualité des pièces produites s'est également dégradées en utilisant ce système ! Quand tu vois les emmerdements à répétition qu'ont désormais les constructeurs automobiles avec leurs équimentiers qui ont délocalisé les productions pour suivre la baisse des coûts exigée par le donneur d'ordre, ce n'est pas brillant comme situation...

[vince]

(...) la délocalisation (...) ça pose des tas de problèmes sociaux outre les problèmes d'efficacité à long-terme.

[Mikej1267]

@thierryler : je ne sais pas quel age tu as mais tes réponses me font penser à quelqu'un de jeune, et/ou à une personne qui n'a pas beaucoup d'expérience de la vie.

Dans le milieu professionnel, la reconnaissance est un vain mot qui n'a plus que l'avantage d'exister dans la langue française. Le monde professionnel est devenu tellement ingrat que au pire, tu as fait ton boulot et c'est bien normal, au prix où tu es payé, estimes toi heureux que ton patron t'emploie, c'est limite une faveur voire du caritatif, au mieux, tu as droit à éventuellement un merci mais qui arrache tellement la g...le de celui/celle qui le prononce que ca ne risque pas de lui arriver trop souvent !!! qu'on se le dise !!!

C'est le vieux con de 42 balais qui parle, avec ses 20 années de boulot derrière lui. Quand j'avais 20 ans, je rêvais aussi comme beaucoup de gloire, de reconnaissance, etc ... La belle vie, un boulot qui paie un max, les bagnoles de sport ou de luxe, les nanas a profusion, etc .. et puis au bout d'un certain temps, tu te rends compte que la vie n'est pas ainsi faite (seulement dans les films qu'on te passe à la TV pour t'abrutir le cerveau et te faire croire que la vie rêvée est ainsi).

A propos de la reconnaissance des jeunes d'aujourd'hui, c'est le syndrome duquel souffrent ces jeunes générations, en mal de gloire, d'admiration, d'adulation, de reconnaissance. Pourquoi d'après toi les jeunes croient et rêvent tellement au travers des émissions de télé réalité telles StarAc ou Nouvelle Tare ??? C'est justement parce qu'ils sont convaincu(e)s qu'ils vont être propulsés au devant de la scène, au rang de star (étoile) le temps du restant de leur vie, et qu'ils seront eux-aussi enviés par leurs ami(e)s et leurs familles. Sous -entendu "enfin, mes parents et mes amis vont voir ce que je vaux et de quoi je suis capable", sous-entendu encore, "enfin, je vais exister car on me verra, m'enviera et au travers de cette convoitise, j'existerais". Le psychologue de 42a a encore parlé. Donc, l'attitude des jeunes face à des appels de la part de journaux demandeurs de toutes illustrations visant à faire de l'actualité la plus réactive possible va dans ce sens. "Oui, moi aussi, avec mon photophone, je peux prendre de belles photos d'un événement et par la-même devenir célèbre". Oui, l'espace d'une parution, après, au revoir, désillusion et douche froide.

Voila comment j'interprète tout cela, mais en soit, ce n'est en effet pas sain pour les métiers de la photo et le photo journalisme en l'occurrence.

[thierryler]

@Mikej1267 : content d'apprendre qu'on a quasiment la même expérience. Je ne fonctionne pas à la reconnaissance mais je crois pouvoir dire que j'ai celle de mon entourage (collègues, clients, chefs, etc.) Si ce n'est pas ton cas, au point que tu imagines que ça n'existe pas (ou plus), alors pose toi des questions. Pour ma part, quand une activité n'a plus d'autre attrait que le pognon, j'en change tout simplement. Mais ça n'engage que moi.

[vince]

http://www.psycho-a-deux-euros.com

[Mikej1267]

@Mikej1267 : content d'apprendre qu'on a quasiment la même expérience. Je ne fonctionne pas à la reconnaissance mais je crois pouvoir dire que j'ai celle de mon entourage (collègues, clients, chefs, etc.) Si ce n'est pas ton cas, au point que tu imagines que ça n'existe pas (ou plus), alors pose toi des questions. Pour ma part, quand une activité n'a plus d'autre attrait que le pognon, j'en change tout simplement. Mais ça n'engage que moi.

Je ne fonctionne pas non plus à la reconnaissance, ce n'est pas mon moteur du tout. Je pense en avoir, tout du moins probablement, mais le fait d'en avoir ou pas m'importe peu.

Je n'imagines pas que la reconnaissance n'existe pas, je suis certain que c'est du pipotage de personnes sans sincérité. Quand on te reconnait à ta valeur, on n'a même pas besoin de te le dire, le message passe souvent bien plus subtilement.

Pour ce qui est de mon activité, en effet, le milieu professionnel dans lequel j'oeuvre ne m'attire et ne m'intéresse plus trop mais on ne peut pas se permettre de faire n'importe quoi quand on a des responsabilités familiales, donc, changer, oui, mais pas n'importe où ni n'importe comment.

[Mikej1267]

http://www.psycho-a-deux-euros.com

Merci Vince, si j'ai besoin de rien, j'irai voir ton lien.

[nyarlathotep]

+1 pour l'opinel non inox : on a que ca pour la cuisine à la maison
nyartathotep écrit : "Le problème, c'est le lectorat qui croit que tout doit leur être gratuit." Le pouvoir d'achat des francais n'a augmenté en 25 ans que pour 30% (des plus riches), il a baissé pour 50% (des plus pauvres). Partout, aujourd'hui, on te demande de faire plus pour te donner moins : il n'y a plus qu'une seule valeur, c'est celle de l'argent, certainement pas celle à envisager pour un "presseur de bouton" de photographe. N'inversont pas le pb pour le retourner sur ceux qui en sont les premières victimes, c'est à dire pas nous vu nos signatures

Je ne m'engagerai pas dans un débat politique. Mais de fait, les 30 glorieuses, ce sont les 30 glorieuses et c'est fini. Mais de fait, sociologiquement, les conséquences de cette croissance inédite ont des répercussions d'aujourd'hui. On ne voudrait pas se priver de ce que nos parents ont connu, alors si on ne peut pas se le payer, qu'on nous l'offre.

Et bien on te l'offre. Gratos. Et gratos, ça veut dire des budgets de pub pour payer le canard qu'on donne gratos, et que la pub, ce n'est pas du mécennat.

Je crois que els gens perdent de vue que le travail, ça se paye. S'ils ne sont pas prêts à payer un canard, qu'il ne s'étonne pas que les gens dedans ne soient pas payés. Bref, le journal gratos, un journal de pauvre fait pour des pauvres avec des dépêches d'agence sans autre plus value de journalisme que celle de l'agence qui la livre et en partie rempli désormais par les pauvres qui le lisent. C'est un concept.

[lemoustic]

...un journal de pauvre fait pour des pauvres avec des dépêches d'agence sans autre plus value de journalisme que celle de l'agence qui la livre et en partie rempli désormais par les pauvres qui le lisent...

Bonjour,

Cela me rappelle une conversion que j'ai eu sur le circuit de Nevers Magny-Cours.

On voyait les dépêches des teams qui arrivaient. Je parlais avec un journaliste qui me (nous -> et mon collègue et ami présent) disait que de plus en plus c'étaient ces dépêches qui étaient reprise dans les journaux sans aucune autre forme.

Elles étaient légèrement, voire même pas du tout retouchées ! On retrouvait les fautes d'orthographes aux mêmes endroits dans les journaux et dans les dépêches. Surtout dans les gratuits.

D'ailleurs on nomme ces journalistes des journalistes de bureau (car assis derrière un bureau).

Eric

[Snoopy]

Tiens je lis votre débat philosophique sur cette France moisie et ces patrons au sphincter élargi et j'avais juste une question en passant :

Parmi tous ceux qui ont crié à l'injustice ici même qu'on leur vole leur travail, leur salaire, combien font leur courses à carrouf' ou dans un hard discount ? Combien achètent du made in xxx parce que c'est moins cher ( enfin on crois ) ? Combien regardent le prix avant la qualité ou les conditions de fabrication ?

Le rapport qualité/prix est pitoyable, certes, mais si les gens ne réagissent pas et s'en contentent, que faire ? Quand on voit que de grandes émissions abrutissantes sur LA chaîne nationale ou sur sa copine montrant des pubs ou des émissions étrangères piquées sur youtube en qualité pourri de chez pourri (visionné sur tv full hd 110 cm bien sûr ) pour une raison que je suppose être "Pas envie ou pas le temps de demander" ou j'ose à peine le croire "sur youtube c'est gratos alors que la tv étrangère va nous faire casquer" et que les neuneus continuent à regarder sans même protester, comment après leur expliquer que la qualité a un prix ?

Ceci dit je rejoins Vince sur l'avenir de la photo mais surtout à cause de la profusion... un peu comme en musique ; mais je reste persuadé que certaines niches vont en sortir renforcées... par contre le reporter photographe

[vroum]

Discussion cet après-midi avec un correspondant local d'un grand quotidien de PQR: les correspondants sont en statut de micro entreprise et la photo qui va avec l'article est payé 3euros, en 1ère page comme en interne. A une époque une photo d'archive était payée moins chère qu'une du jour, mais ce n'est plus le cas.