Hier, fin d'après-midi...
Je viens de commencer à vous lire lorsque mon cerveau perçoit le mouvement furtif d'une ombre massive chutant devant une de mes fenêtres.
Curieux, j'abandonne mon clavier et vais voir de quoi il retourne.
Au travers du rideau je distingue vaguement une très grosse merlette, ailes ouvertes, en train de s'affairer nerveusement au sol. Intrigué par la grandeur de celle-ci et soucieux qu'elle puisse être blessée, j'entr'ouvre avec lenteur le rideau.
C'est alors que mon sang ne fait qu'un tour! Il s'agissait d'un petit rapace tout fin. Il tenait entre ses serres une dépouille de petit oiseau qu'il s'affairait à déplumer sauvagement, à coups de bec furieux. Seigneur, quelle brutalité !
Mon premier réflexe fut d'essayer de déterminer ce qu'était ce rapace. Vu sa taille, ce devait être un beau faucon crécerelle; mais... tiens ?... il n'en a pas la robe ! A cet instant de mes réflexions, le criminel se tourna vers moi, avec un regard à vous glacer le sang. 'Tain ! c'est une jeune buse variable... ou serait-ce autre chose? Il faut que j'en aie le coeur net... photos !!!
Préoccupée par sa pitance, la buse ne fit pas attention lorsque je remis le rideau en place précipitamment pour aller chercher mon A-700 (équipé du 300 G-SSM), monté sur un trépied et lascivement à l'affût des mésanges affamées par l'hiver.
En pleine effervescence, je revins donc lourdement armé de mon matos et, partiellement caché derrière ma grosse photocopieuse, entrepris de dégager la fenêtre de son rideau. Constatant ensuite que la buse ne se préoccupait absolument pas de moi, je me mis à genoux et me glissai sur le côté du meuble pour pouvoir faire des tofs de l'action. (



C'est alors que je constatai que... oh !... horreur !... Mes chiens (boxers) avaient frotté leur truffe sur la vitre lorsque mon épouse était partie faire des commission en début d'après-midi ! Vous ne pouvez pas imaginer combien leur marques séchées avaient sali la vitre. Plein de zones glauques rendant la vitre à peine translucide.
Mais c'est pas vraiiii ! Déjà que faire des tofs au travers de doubles-vitrages c'est pas le top, mais là, avec ces marques partout, c'est foutu ! Tant pis, je tente le coup en posant le bord du pare-soleil contre la vitre et... clic ! Vite voir sur l'écran... chit, manquait plus que çà ! mauvaise expo, PDV plate, pas de contraste, flou de bougé, et tout le toutim !
Grosse panique ! Tant pis, pas le temps de chipoter à tous les boutons ! Correction d'expo, rien de plus... le reste, je le ferai sur l'ordi (débutant và !)
Clic et clic et clic et... mais...
Dieu ! c'est pas vrai !... c'est atroce!... la victime vit encore !
C'est une belle petite grive musicienne et la pauvre, paralysée par les serres de son bourreau qui lui déchire le dos ne cesse d'ouvrir et fermer le bec. Je n'entends aucun son, mais je vous jure, je sens sa plainte me percer de part en part.
Hélas, je sais que je ne peux rien faire. Les dommages corporels sont déjà trop importants. Dures les lois de la nature !
Parfaitement écoeuré, mais cependant hypnotisé par cette scène dramatique, je continue à photographier tout en compatissant pour la belle.
Tout-à-coup, mue par un profond instinct de survie et d'un brusque mouvement sur le côté, celle-ci parvint à se dégager des griffes de son tortionnaire. Mais hélas pour elle, le rapace veillait et, d'un seul saut, il ressaisit la malheureuse dans ses serres monstrueuses et reprit ensuite son oeuvre macabre, sans pitié, mais par intermittance.
Lorsqu'il s'arrêtait, il jetait des regard malveillants vers sa gauche et sa droite afin, probablement, de s'assurer que rien ne viendrait lui contester son repas en devenir.