Pour expliquer un peu plus l'histoire de pointer sur un blanc/gris, il faut savoir d'abord que le blanc comme le gris en fait sont colorimétriquement la même chose, un blanc est juste un gris très lumineux et un gris un blanc moins lumineux.
Par définition, ces blancs et gris correspondent au cas où le pourcentage de chacune des trois couleurs primaires (Rouge, Vert, Bleu) est tel que notre œil ne voit plus de couleur, mais une échelle Noir/Blanc de luminosités.
Dire au boitier ou au logiciel de prendre comme référence telle plage dans la photo (charte ou plage d'un élément naturel de la photo) revient à lui dire qu'il doit se régler pour que x% de Rouge plus y% de Vert plus z% de Bleu soient restitués comme un gris ou blanc (selon la luminosité).
Ces pourcentages sont variables selon la lumière qui illumine le sujet (d'où la nécessité de régler la BdB).
Pour prendre un exemple extrême, mais pédagogique, quand on met une feuille de papier "blanc" sous un spot rouge, le papier ne peut que réfléchir la lumière qu'il reçoit, et avec un réglage "lumière du jour" de la BdB apparaitra sur la photo comme fortement rouge. Dans ce cas, il faut modifier la BdB pour que ce soit un mélange comportant beaucoup plus de Rouge que de Vert et de Bleu qui soit restitué comme du blanc dans la photo.
Bien sur, cf. juste au-dessus, cela ne marche que si toute la scène est illuminée par un éclairage ayant uniformément la même "dominante", la même température de couleur (TC). S'il y a différent éclairages de TC très différentes, ce ne peut qu'être la galère pour restituer les couleurs
(notre cerveau est en fait beaucoup plus souple que la pellicule ou le capteur photo pour gérer cela). En pratique, il faut soit faire un compromis forcément bâtard entre les différentes sources, soit se caler sur l'une (en général celle éclairant le sujet principal) sachant qu'alors les zones éclairées par les autres auront les dominantes correspondantes.
Bien sur dans le cas précédent (glace ou neige que notre cerveau exige de retrouver bien blanc sur la photo), soit on réétalonne la BdB sur chaque cadrage comme expliqué, mais c'est là aussi où la pipette sur le raw en post-traitement est le plus pratique (dès lors qu'on a une plage de glace ou de neige dans le cadre). Malheureusement sur beaucoup de sujet "naturels", on n'a pas la plage blanc de référence dans la photo.
Les spectacles avec leurs spot colorés sont souvent des horreurs pour le réglage de BdB!
Encore samedi dernier en milieu d'après-midi sur une scène dans la salle des fêtes municipales où Mme dans un petit groupe de l'école de musique jouait quelques morceaux: salle, y compris scène baignant dans la lumière du soleil entrant par les nombreuses fenêtres. Mais sur la scène (et surtout le mur de fond) un violent spot jaune et un autre violent spot rouge.
Bien sur j'ai les raws qui vont me permettre de choisir les moins mauvais compromis de BdB, cadrage par cadrage. (en raw, on fixe la BdB au traitement du raw).Mais mon épouse, vêtue essentiellement en noir et dont le visage coté salle était éclairé (modérément) par la lumière du jour se trouve devant la grande tache rouge très lumineuse sur le mur du fond derrière elle. Résultat sur les jpeg (et donc vignette de visualisation du raw), quand je la cadrais seule, la BdB auto se basait sur la dominante rouge du mur du fond, et le visage de Mme apparait donc dans la couleur complémentaire, un beau cyan, autrement dit visage bleu-vert totalement cadavérique digne des zombis des films d'horreur!
D'où aussi la règle d'utilisation des chartes de gris: il faut impérativement disposer la charte dans la scène pour qu'elle soit éclairée par la source de lumière qu'on veut prendre pour référence (et pas par une autre).
Maintenant, en numérique c'est vrai que dans les cas simple, la BdB auto est en général très fiable. Et dans les cas complexes, la charte ne permet que de privilégier une des sources, mais pas de donner un compromis acceptable par l'œil entre les sources de TC très différentes.
Pour moi, la charte sert surtout quand on a besoin de restituer avec une très grande fidélité des couleurs, et surtout un camaïeu de couleurs proche: photo de mode, reproduction notamment de tableaux... ou certaines couleurs en général peu saturées, comme la couleur chair (couleur de la peau) qui peuvent varier très vite avec de faibles modification de la BdB.
A l'inverse, chercher le blanc fidèle n'est pas forcément la bonne solution pour restituer une ambiance telle que la perçoit notre cerveau. Exemple le plus classique, un intérieur éclairé avec les seules classiques ampoules à incandescence. Se caler sur une plage blanche va donner une impression très froide sur la photo. Pour retrouver l'ambiance de la pièce, il vaut mieux laisser une dominante jaune orangée
(au détriment certes de la fidélité des couleurs du tableau accroché au mur derrière le canapé, mais si le tableau n'est pas le sujet principal, peu importe).PS: Il y avait aussi la question sur blanc ou gris. Comme expliqué au début, c'est la même chose colorimétriquement, seule la luminosité change. Et une dominante se voit mieux sur un gris moyen/clair que sur un blanc. Bref cela marche mieux, surtout si on ajuste à l'œil (sur un écran bien calibré, bien sur!) sur une plage de gris clair que sur un blanc franc. D'ailleurs parfois le réglage boitier ou pipette se termine par un message d'impuissance si on utilise une plage d'un blanc trop lumineux.